L’opération 2017 concernait les deux enclos et les dépendances du domaine du Rousset :
1. en avant du château, une plate-forme est délimitée par les dépendances, au sud-ouest, les vestiges de bâtiment et une tour ruinée, au sud-est, une cassure de terrain entre ces derniers et l’est du donjon. Cette terrasse est occupée par 624.83 m2 de construction s’organisant autour d’un espace de 606 m2. Les bâtiments sont regroupés en 2 îlots liés au château, à l’ouest, par un portail fortifié, à l’est par un mur de clôture, et entre eux par un portail ogival fortifié ?
2. le domaine du Rousset est enserré par une clôture qui suit une orientation allant de l’ouest au nord-est en passant par le sud.
3. Le moulin et la pêchoire, extra-muros ont été étudiés ainsi que les aménagements hydrauliques
Au terme de l’étude 5 états ont été identifiés et séquencés chronologiquement :
Fig. 1 : plan d’ensemble, phasage ; Relevés M. Busseuil, L. Montrobert, J. Verrier ; D.A.O. M. Busseuil
1. Etat 1 : aménagement hydrauliques, antérieur 1318 (1° mention)
Deux retenues d’eau, deux biefs sont aménagés pour alimenter une pêchoire (réserve piscicole et alimentation en eau domestique) en amont du château, et un moulin en contrebas de la façade nord du château, fonctionnant grâce à une roue horizontale.
2. Etat 2 : construction de l’enclos 1, début XVIe siècle
Des dépendances sont édifiées en avant du château. Elles sont équipées d’éléments de défense (tours, archères canonnières à ébrasement intérieur) et d’une porte à linteau à accolade. Les bâtiments sont regroupés en 2 îlots liés au château, à l’ouest, par un portail fortifié, à l’est par un mur de clôture, et entre eux par un portail ogival fortifié. Les ouvertures civiles et militaires sont typiques du XVe siècle.
Fig. 2 : typologie des ouvertures civiles ; M. Busseuil, P. Richagneux, J. Verrier, M. Vissac ; D.A.O. M. Busseuil
3. Etat 3 : construction enclos 2, fin XVIe siècle (Guerres de la Ligue)
Le domaine du Rousset est enserré par une clôture qui suit une orientation allant de l’ouest au nord-est en passant par le sud. La muraille enserrant le château, les dépendances et les terres du Rousset est constituée de murs simples et d’une partie fortifiée : tours, ouvertures de défense, bastions, boulevards…. ; d’une longueur totale cumulée de 763.68 m. Au total, cette enceinte protège 624.63 m2 de dépendances (surface au sol) et 472 m2 de château (surface au sol) et 1.82 hectares de terres. L’architecture du grand portail fermant ce réseau de fortification est à ce jour, inconnue.
La forte rupture de pente a obligé à un équipement en terrasse de la face est du promontoire rocheux. Mais qu’elle était la fonction de cet aménagement : terrasse de culture ou réseau lié à la défense du château. Le lien des murs entre eux et avec les éléments spécifiques de défense (bastions/ravelins/talutage/boulevards…) laisse supposer une attribution plus défensive.
Les éléments de datation pour la construction de l’enclos 2 sont principalement les ouvertures de défense : meurtrières à double orifice et archères canonnières à ébrasement extérieur. Les premières sont typiques des fortifications de la Ligue et les secondes du XVIe siècle. il semble donc que l’enclos 2 puisse être daté de la fin du XVIe siècle.
La stratégie d’implantation de tous les éléments de défense dénote une réelle volonté de se protéger. Le pourtour de la clôture assure une protection contre toutes les attaques possibles, d’où qu’elles proviennent. Du sud à l’ouest, tous les accès sont protégés par la canonnières et les meurtrières, le relais est pris du nord-ouest au nord est par les archères canonnières du donjon, du nord-est au sud-est, les bastions et boulevards protègent d’éventuelles arrivées par la rivière et le vallon et enfin les deux tours d’angle défendent le sud. A l’intérieur, le flanc est du promontoire a été aménagé selon les critères d’une fortification bastionnée et talutée. L’esplanade ou terrasse est tout indiquée pour recevoir une grande couleuvrine.
Ces 24 canonnières et meurtrières nécessitent également un grand nombre d’hommes et d’armes. Les seigneurs du Rousset (Georges ou François de Damas) avaient-ils la possibilité, et les moyens, d’armer efficacement son château ? Malgré une logistique lourde à gérer, les troupes armées pouvaient-elles venir se retrancher ou s’entraîner au Rousset ? A ce jour, ces hypothèses demeurent des probabilités et il est plus judicieux d’envisager cette mise en défense comme un avertissement, pour impressionner et réfréner toute velléité d’attaques, grâce à l’ampleur des aménagements.
Fig. 3 : typologie des ouvertures militaires ; Relevés A. Bousquet – M. Busseuil, L. Vernet – P. Richagneux, J. Verrier ; DAO M. Busseuil
4. Etat 4 : transformation des dépendances, XVIIe siècle
Les deux enclos et les dépendances, situés à l’intérieur, vont subir des transformations. Toutes les élévations vont être percées par des ouvertures (grands portails, portes et fenêtres). Trois édicules vont être construits : deux collés sur la façade est de la dépendance 1 et un sur l’extrémité ouest de la façade sud de la dépendance 2. Un grand portail va être installé sur un des murs de l’enclos 2.
Deux éléments architecturaux remarquables permettent de caler chronologiquement cet état de travaux :
- un grand portail en plein cintre est aménagé dans la façade sud de la dépendance 2. Sa clef de voûte est ornée d’un disque avec en son centre un symbole de protection IHS. Son graphisme est similaire à celui de la porte de la tour d’escalier, lui même identique à celui de Gumières qui porte la date de 1605.
- un pigeonnier au-dessus du grand portail est mentionné dès 1683 et jusqu’en 1907. Malheureusement, il ne subsiste que peu d’éléments de ce pigeonnier-porche.
Fig. 4 : pigeonnier-porche, restitution ; J. Verrier
5. Etat 5 : transformations récentes, fin XIXe siècle/XXIe siècle
Cet état correspond aux derniers travaux subis par l’intégralité des bâtiments domestiques, enclos 1 et 2 : destruction (tour, îlot 2, pigeonnier-porche), reconstruction (moulin), aménagements (portes, fenêtres, cloisonnages….). Le but de ces travaux est certes le confort mais surtout une volonté d’assainir le domaine en déblayant les éléments inutiles, probablement en ruine et de l’adapter aux nouvelles techniques agricoles.
L’opération 2017 met un terme à l’étude de la naissance, évolution et fonctions du château du Rousset. En effet, l’ultime investigation concernant les dépendances, les enclos et les aménagements hydrauliques clôt un programme qui aura duré 8 ans.
Ces opérations ont permis d’apporter des éclairages sur la construction du château et ces remaniements successifs. Mais également, il a été possible d’établir une chronologie relative et absolue quant aux périodes de leur réalisation.
Au terme de cette étude et grâce aux vestiges encore en place, les séquences des dépendances et des enclos ont pu être raccrochées à celles déjà bien documentées de l’ensemble du château du Rousset. La maison noble va progressivement se transformer en résidence de plaisance en passant par une période de fortification conséquente, durant les Guerres de Religion.
Fig. 5 : évolution du domaine du Rousset ; DAO M. Busseuil